Faut-il compter sur le téléphone portable pour devenir un outil indispensable au photojournalisme ? Prendre des photographies avec son téléphone portable est-il devenu l’élément journalistique qui permet d’être au coeur d’un évènement pour une diffusion plus juste de l’actualité ? Le téléphone portable ne joue-t-il pas sur une surconsommation de l’image ? Le photojournaliste du XXème siècle est-il en train de décliner pour laisser la place à une nouvelle ère du photoreporter ?
Commencer l’introduction de cet article par des questions me semble intéressant. Ces quelques questionnements ne sont que le sommet d’un iceberg plus complexe qui pose des réflexions sur le métier de photojournaliste tel que nous l’avons connu.
Avec les tristes actualités que nous avons connues comme les catastrophes au Japon, des milliers de photographies et de vidéos nous sont parvenues très rapidement et au coeur des évènements. Le téléphone portable serait en devenir pour être l’outil du photoreporter ?
Quand le New York Times donne le pas
Le 21 novembre 2010, le célèbre quotidien « New York Times » consacre sa Une à un reportage de guerre en Afghanistan. Les photos réalisées par Damon Winter étaient réalisées avec un simple iPhone 4 et l’application Hipstamatic (article sur cette app ici). Coup de génie du N Y T ? Précurseur ? Effet de mode ? Cette Une de novembre marquera un tournant dans l’histoire du photojournalisme.
Nous sommes à la genèse de ce nouveau journalisme. Avant la quatrième génération d’iPhone, il était très difficile d’obtenir des images de bonne qualité. Ce dernier modèle permet enfin de faire des photos correctes si la luminosité est suffisante.
Le constat est clair : « Tout le monde peut avoir un appareil qui donne des images de grandes qualités mais choisir une bonne technique pour servir une démarche ou un regard me semble très important. »
Les choix controversés de Damon Winter : polémique ?
Les photos sont assez étonnantes, simples et sans concession. Avec ce reportage qui met en scène la vie du premier bataillon, infanterie 87e de la 10e division de montagne dans le nord de l’Afghanistan, Damon Winter remporte la troisième place de Pictures of the Year International avec cette série « A Grunt’s Life ».
Une polémique est née peu de temps après lorsque Damon Winter a énoncé que l’appareil qu’il avait utilisé était juste un simple iPhone avec l’application Hipstamatic. Une controverse a éclaté en ligne sur la validité d’un tel outil dans le monde du photojournalisme. Par la suite, Damon Winter a rédigé une lettre pour défendre ses choix.
Nous sommes naïfs si nous pensons que l’esthétisme ne joue pas un rôle important dans la façon dont les photojournalistes racontent une histoire. Nous ne sommes pas des photocopieurs. Nous sommes des conteurs.
Il défendra ses choix en parlant de l’utilisation massive de photoshop dans le milieu du journalisme. Il mettra également ses moyens qui a jugé que son iPhone était efficace pour capturer le quotidien de ces soldats.
« Composer une photo avec iPhone est plus désinvolte et moins calculé. Et les soldats se prennent souvent en photo avec leur téléphone, ils étaient plus à l’aise que si j’avais eu mon appareil classique. »
Encore une fois, les choix esthétiques et la maturation d’une véritable démarche priment sur l’appareil ou l’outil utilisé. C’est une véritable leçon de photojournalisme que nous apporte Damon Winter à mon humble avis.
Retrouver l’entièreté de la lettre de ce photographe via ce lien.
Les différentes parties proposées dans ce dossier
- Introduction à l’iphonographie
- Hipstamatic : la fer de lance de l’iphonographie ? (Partie 1)
- Différentes applications pour faire de la photographie avec son iPhone (Partie 2)
- Instagram : Le réseau social des iphonographistes ? (Partie 3)
- Le téléphone portable est-il devenu une composante du photojournalisme ? (Partie 4)
- Iphonographie : développement à la créativité ou produit de consommation ? (Partie 5 – Conclusion)
Ce n’est pas l’outil qui fait le bon artisan. Vu l’utilisation massive du numérique (et des corrections photoshopées), je trouve ce procès d’intention ridicule.
Etant assez nul en photographie, un Canon EOS-1Ds Mark III entre mes mains ne changera en rien mon « talent » inné, à l’inverse avec un simple « jetable argentique », un bon photographe fera des merveilles !
Merci pour ton commentaire InTheBlix. En effet, ce n’est pas l’outil qui fait le photographe et je l’explique dans cet article. Par contre, je ne vois pas très bien ce que tu veux dire par procès d’intention car j’essaie justement de mettre en valeur l’utilisation de cet outil qui est souvent décrié par certains photographes.
N’hésite pas à réagir et à me donner ton avis sur le sujet
Question de formulation : la Presse veut elle encore payer le travail du photojournaliste ?
je ne pense pas, donc n’importe quel photo venant de n’importe quel appareil fera l’affaire pas besoin de compétences particulières puisque la photo n’a plus qu’une vocation illustrative.
Ta remarque est pertinente et planche sur un autre débat qui est : qu’est-ce que le photojournalisme aujourd’hui ?
Ce dossier essaie de mettre en lumière différentes composantes de l’iphonographie dont celle utilisée dans le photojournalisme.
Je comprends le débat de fond sur le journalisme actuel se doit d’être discuté mais cela mériterait alors un nouveau dossier basé sur la genèse, le cheminent et l’avenir possible du photojournalisme.
Pour ce qui est de la photographie purement illustrative, je vais parler de ce que je connais. La presse belge (je parle des grands journaux) utilise trop peu les photographies en terme de narration. Elles ont une fonction illustrative. Par contre, je ne sais pas de ce qu’il en retourne de la presse américaine ou dans d’autres pays européens mais si je prends le magazine GEO, les reportages sont clairement illustrés avec des photographies qui suivent une certaine narration à mon humble avis.
Encore une fois, nous sommes dans un débat autour du journalisme et pas de l’iphonographie.
Je te remercie pour ton commentaire Pivi